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Sur son blog une amie raconte l’histoire de ...ses cailloux.
Puis-je vous raconter la mienne d’histoire .
Avant tout, je dois vous dire que S,ma compagne, était non croyante estimant que le monde est trop injuste pour qu’un
Juge, si grand soit-il, puisse le diriger. Pour ma part, j’avoue trouver en moi un reste d’éducation du lycée religieux que j’ai fréquenté mais j'avoue aussi que
le temps passant mes yeux grands ouverts ont vu tant et tant de choses que ces années les brouillent.
Habitant la frontière espagnole, nous allions très souvent passer nos dimanches à parcourir la campagne espagnole, à profiter des prix des restaurants et promener notre chien qui depuis nous a
quittés après quatorze années d’amitié.Ce jour j’avais déniché un coin tranquille pour garer la voiture puis nous promener, ou plutôt, c’est connu, pour que notre chien nous
promène.
Nous étions sur un chemin de terre ne desservant aucune maison et n’aboutissant nulle part.
Surprise ... à un moment, sur environ quelques centaines de mètres, la terre s’était transformée.. en une route fraîchement goudronnée, d’un noir, si noir et si propre qu’il dénotait
au milieu de la nature verte . Nous en parlâmes bien entendu et conclûmes qu’un promoteur influent , un de plus,viendrait certainement bétonner ce coin comme l’est la côte
espagnole qu’elle soit “Brava” ou pas..
Tout en marchant nous trouvions comme sujet de discussions, des thèmes nous opposant de temps en temps, souvent juste assez pour étaler nos prétendues connaissances sur ceci ou cela.
Je me rappelle très bien la suite de notre promenade .
...À un moment notre discussion prenant des allures de défis, j’entendis S me dire , d’une voix presque inhabituelle...
- Si ce Dieu que tu m’opposes...Si ce Dieu existe...qu’il m’en donne la preuve.
Ce que je n’oubliais jamais de ma vie, c’est la vision de S pétrifiée sur place,balbutiant les derniers mots, sa main pointant d’un doigt le sol noir à deux mètres devant elle... me dire d’une voix à peine audible ...
- Regarde , regarde devant toi.
Mes yeux suivirent la direction qu'elle m'indiquait...et j’ai vu sur l’asphalte noir, impeccablement propre comme un sou neuf,à la limite sans la moindre poussière, au milieu de la route , un caillou...un seul caillou sur le noir de cette route...un seul... un caillou blanc, tout blanc, d’environ trois centimètres de diamètre avec, le traversant, une incrustation noire en forme de croix, ...croix parfaite par la répartition de ses branches ...la CROIX...celle qui nous obsède depuis 2000 ans.Il n’y avait pas d’autres cailloux , juste un...un seul sur ce sol noir... une pierre Blanche avec sa Croix Noire.
Je l’ai ramassé et nous ne nous sommes plus rien dits, chacun de nous s'enfermant dans ses pensées en lutte avec ses croyances . Le soir-même il trouva une place au milieu de divers souvenirs que nous rapportions de nos voyages et n'y bougea plus jusqu'à ce que je le place à celle qui est naturellement la sienne .
Il fut, néanmoins, pendant un certain temps, l’objet de nos discussions, S. concluant... "ce n’est pas pour cela que je vais croire...mais, j’avoue en être troublée ". Moi je me remémorais les leçons " primaires “ de cathé qui ne cadraient plus avec notre monde,excluant “ l’obligation de croire “ , nos yeux grands ouverts contemplant avec horreur l’injustice qu'il nous imposait.
Mais comment admettre la présence de ce caillou juste à ce moment précis du défis lancé par S ?
A plusieurs reprises nous retournâmes dans ce coin d'Espagne, à la recherche de cette portion de route noire. Nous n'avons jamais pu la retrouver ce qui troubla encore plus nos pensées et éloigna
définitivement toute discussion évoquant ce caillou.
Et le temps passa... jusqu'au jour qui pour S fit naître la Nuit.
Ses cendres reposent dans une stèle semis-vitrée dans le jardin des souvenirs du crématorium . À travers la vitre du reposoir on peut voir un caillou blanc avec une Croix Noire.
Plus tard, des années après le départ de S,ce caillou me fit écrire ...
elle cesserait d’être La Vérité.
La seule liberté qui nous est laissée,
c’est celle d’espérer que même
de l’autre côté de La Porte De La Vie,
cette Vérité ne nous apparaisse jamais,
afin que nous puissions continuer
d’espérer en la cherchant l’Éternité durant.
Croire c’est cela, et rien d’autre.
De temps en temps, j’ouvre le reposoir pour toucher le petit caillou et j’ai l’impression ne pas être seul, quelqu’un d’autre a le même geste que moi.
Je suis certain que si nous étions musulmans, l’incrustation dans la pierre blanche aurait eu la forme d’un cartier de lune , si nous étions Juifs une
étoile à six branches aurait attiré notre regard, mais nous sommes chrétiens, alors le Créateur,le Dieu Universel , s’ adaptant comme il peut...même à travers un petit caillou... nous avait
transmis une infime parcelle de son souffle .
Chaque fois que je le retrouve j'entend une voix, la mienne ou pas, quelle importance ...
...Qui connaît la Vérité ....?
Si un jour quelqu’un ....
Pourtant ce n’est que l’histoire d’un petit caillou ...comme ceux qui marquent certaines religions en Asie, mais aussi en Amérique du Sud et surtout les tombes juives
cernées par de petits cailloux comme pour laisser une trace du passage...le souvenir d’un ami.
Un jour mon petit caillou me rapprochera définitivement de celle pour qui il fit ce grand voyage et je pourrais lui
murmurer....Enfin.
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( L’histoire de mon petit caillou est libre de tout “ copyright “ ).